Retraite
Passage à une part de capitalisation, recul de l’âge de départ… Où en est le conclave sur les retraites ?
Le conclave sur les retraites, qui se conclura le 17 juin, traverse des tensions avec des syndicats en désaccord sur des points essentiels comme l'âge et la capitalisation. La CGT appelle à manifester, tandis que certains estiment nécessaire de repenser le modèle social et de mieux répartir les ressources. L'idée d'une part de capitalisation émerge, face à un déficit anticipé de 14,5 milliards d'euros d'ici 2035. Les discussions à venir seront cruciales.

Plus de trois mois après son ouverture, le « conclave » sur les retraites arrive dans sa dernière ligne droite et devrait se conclure le 17 juin prochain.
La CGT, sortie des négociations, a appelé à une manifestation pour l’abrogation de la réforme jeudi 6 juin dès 14h. Alors que les discussions semblent s’enliser et que les partenaires sociaux redoutent un rendez-vous manqué, les députés ont voté ce matin un texte symbolique appelant à l’abrogation de la réforme. Point d’étape.
Des discussions dans un climat tendu
Marylise Léon, secrétaire générale de la CFDT, l’un des cinq syndicats encore présents autour de la table et qui n’ont pas claqué la porte des négociations, veut y croire. « Un accord est toujours possible, parce qu’il y a de vraies attentes sociales », a-t-elle indiqué sur le plateau des "4V" sur France 2 ce mardi 4 juin. « Aujourd’hui, il faut que le patronat fasse un pas. (...) Pour le moment, on est dans l’attente de voir comment le patronat rentre véritablement dans les discussions, avance et reconnaît qu’il y a un sujet », a souligné la syndicaliste.
Le Medef semble pourtant rester sur ses positions et ferme aux demandes des syndicats de salariés, notamment sur la possibilité de partir à la retraite plus tôt pour :
- les femmes ayant eu des enfants ;
- les personnes ayant travaillé dans des conditions pénibles ou usantes.
Trois réunions encore prévues
D’ici au 17 juin, date à laquelle le conclave est censé prendre fin, trois réunions doivent encore avoir lieu. Dans les faits, le recul de l’âge ne semble même plus faire partie des négociations.
Force Ouvrière, syndicat ayant quitté la table, déplorait que la « lettre de cadrage » envoyée par le Premier ministre fin février se concentre uniquement sur le déficit, en oubliant totalement la question de l’âge de départ à la retraite. François Bayrou avait d’ailleurs clairement annoncé en mars que, pour lui, un retour à 62 ans était impossible.
Repenser l’État-providence ?
En avril, les négociations semblaient d’ailleurs déjà s’orienter davantage vers une refonte du modèle social que vers un simple ajustement de l’âge de départ à la retraite. Une note d’objectifs présentée par trois syndicats de salariés et les deux organisations patronales encore engagées dans la discussion proposait de s’attaquer notamment à la question du « déficit ».
Dans un rapport publié en février, la Cour des comptes tablait sur un déficit de 14,5 milliards d’euros à l’horizon 2035 — certes loin des 45 à 55 milliards d’euros évoqués par François Bayrou d’ici 2030, mais tout de même considérable.
Cette feuille de route évoquait notamment la possibilité de mieux redistribuer les ressources entre les différentes branches de la Sécurité sociale (assurance maladie, famille, retraite…).
Invité sur France Inter mercredi, l’ancien Premier ministre Édouard Philippe estime lui aussi que le système des pensions doit être revu en profondeur. Il a ainsi évoqué l’idée d’ajouter une part de capitalisation au système par répartition actuel, en raison notamment de la dénatalité.
Avec des naissances insuffisantes, la répartition arrive selon lui à bout de souffle. « Tous celles et ceux qui racontent que l'on peut baisser l'âge de départ à la retraite, que l'on peut ne pas tenir compte de ce qui est en train de se passer dans notre démographie, ils sont dans le déni du réel », a-t-il déclaré. « La deuxième chose, c'est mettre en place un système de capitalisation qui n'a pas vocation à remplacer complètement la répartition (…), on peut arriver à mon avis à 15 % », précise-t-il.
Le patronat est également favorable à cette solution qui inciterait donc chaque Français à prendre davantage en main sa propre retraite en investissant dans des produits financiers comme le PER.
Un vote symbolique à l’Assemblée
Au terme du conclave prévu pour le 17 juin, un compte-rendu sera présenté au gouvernement pour faire le point sur l’issue des négociations.
Geste symbolique mais significatif, l’Assemblée nationale a par ailleurs voté ce jeudi matin un texte non contraignant appelant le gouvernement à abroger la réforme des retraites. Cette résolution, déposée par le groupe GDR (communistes et ultramarins), était soutenue par la gauche ainsi que par le Rassemblement national.
Le texte est sans portée législative. Il pourrait toutefois « donner un peu de carburant pour une remobilisation sociale sur le sujet », indiquait le député de Seine-Saint-Denis Stéphane Peu, président du groupe GDR. À Paris, le cortège des manifestants devrait justement s’élancer à 14h depuis l’École militaire. Plusieurs manifestations sont aussi prévues dans d’autres villes françaises.